Les Tramways Hippotractés - 1874 /1894
LES TRAMWAYS A CHEVAUX...
Le Havre fut une des premières villes de France à disposer d’un service d’omnibus à chevaux, puisque c’est en janvier 1832 que la première ligne fut ouverte entre le Musée (à l’époque à l’extrémité de la rue de Paris) et la Barrière d’Or (carrefour de l’actuelle rue Aristide Briand et du Boulevard de Graville). En 1854, la réseau comptait 6 lignes numérotées de A à F mais dont certaines ne proposaient que quelques départs par jour.
En 1854, un ingénieur dénommé Perrotte proposait à la Municipalité de construire un réseau de voies ferrées desservant plusieurs quartiers de la ville. La ligne principale devait relier Le Grand Quai (actuelle Chaussée Kennedy à Graville par la Rue de Paris et la Grande Rue d’Ingouville (actuelle Avenue Réné Coty). Un embranchement était prévu entre l’Hôtel de Ville et la Gare par le Bd de Strasbourg.
Ce projet remarquablement en avance sur son temps (Le Havre aurait alors été une des toutes premières ville du monde à disposer d’un tramway) fut repoussé par la Municipalité.
Il faut attendre 1872 pour qu’un projet de «chemin de fer américain » (c’est ainsi que l’on nommait les tramways à l’époque) refasse surface suite à la proposition d’un banquier belge M. de la Hault (Banque française et italienne) de remplacer les deux principales lignes d’omnibus par des tramways.
Les deux lignes envisagées étaient :
La ligne reliant le Musée à la Barrière d’Or (Octroi de Rouen)
L’autre partait du centre ville et devait se diriger vers les Docks et les Abattoirs.
Le Conseil Municipal approuvait à l’unanimité le tracé de la première ligne mais refusa la ligne des Docks en raison des projets de développement de nouveaux bassins et des encombrements du Quai Colbert. A la place, le Conseil préconisait une ligne vers Sainte Adresse.
Ci dessous, un tramway hippotracté à la hauteur du croisement entre le Boulevard de Strasbourg et la Place de l'Hotel de Ville (actuel terminus des lignes 8 et 11 Bus Océane)
La 1ère ligne
En octobre 1873, la concession du réseau de tramway était accordée à Monsieur de la Hault et à sa banque et en novembre 1873, les travaux de pose des voies commençaient Rue de Paris. Les travaux furent mené rapidement puisque le 1er février 1874 le service régulier débutait entre la Jetée et la Barrière d’Or. Le 15 février 1874, une navette reliant l’Hôtel de Ville au Rond Point en passant par La Gare est mise en service comme complément de la ligne principale.
La fréquence sur la ligne principale était d’un passage toutes les 15 minutes et de 10 minutes sur la navette via la Gare.
Le Havre devenait ainsi la deuxième ville de France à être desservie par tramway après Paris (et à Paris cela ne concernait que deux lignes vers Sèvres et Marly).
Ci dessous, la première ligne de tramway (acyeulle ligne 2 Bus Océane) quelques mois après son inauguration. Photo prise devant l'Hotel de Ville, du côté de l'actuel kiosque Bus Océane.
La ligne de Sainte Adresse:
Le 1er octobre 1875, une première partie de la ligne de Sainte Adresse est mise en service entre la Gare et les 4 Chemins (en reprenant la navette de la Gare) puis est progressivement prolongée à la Broche à Rotir en 1878 et au Carreau en 1879. Avec cette ligne les tramways sortaient du périmètre havrais et une tarification spécifique était introduite (section supplémentaire).
Ci dessous, un tramway hippotracté dans sur le Cours de la République, près du Rond Point un jour de marché. Les immeubles sur la gauche existent toujours en 2009.
La ligne des Docks et des Abattoirs:
La ligne des Docks et des Abattoirs qui avait été envisagée dès le début du projet revint à l’ordre du jour dès 1878. Le passage par le Qaui Colbert posant de nombreux problèmes et après de nombreuses discussions entre la Ville, La Compagnie et les Chemins de Fer de l’Ouest, ces derniers cèdent à la ville une bande de terrain qui permet de créer la rue Charles Laffite où passera le tramway des Docks.
Le 30 mai 1880, la nouvelle ligne reliant la Place Gambette et les Abattoirs via L’Hotel de Ville, la Gare, le Rue Marceau et la Rue Paul Marion était mise en service.
A noter qu’entre temps, en 1879 la concession qui avait été accordée à Monsieur de la Hault et à sa banque était rétrocédée à la CGFT « Compagnie Générale Française de Tramways » société anonyme crée à cet effet par le financier.
Malgré de nombreux projets de prolongements, demandés par le Conseil Municipal ou les populations, le réseau reste stable jusque dans les années 1890 au point qu’à cette époque la CGFT est confrontée à de violentes critiques dont notamment celle d’utiliser les bénéfices qu’elle réalise sur le réseau havrais pour équiper les réseaux de Marseille et de Nancy.
Face à ces critiques et à la concurrence qui se profile, la Compagnie se devra de réagir et de moderniser son réseau : la voie vers l’électrification était ouverte.
Quelques aspects techniques du réseau de tramways hippomobiles du Havre:
La voie :
Lors de sa construction, les voies furent construites à l’écartement dit normal ‘(1,435m) c’est à dire celui du chemin de fer. Les voies ayant été construite de manière très légère, les rails s’étaient légèrement écartés en passant à un écartement 1,453 m. Le matériel hippomobile fut adapté et cet écartement devint l’écartement officiel du réseau. Il fut conservé lors de la conversion à l’électricité.
A l’origine, les lignes avaient été construite à voie unique avec des évitements où se croisaient les voitures, mais dès 1875, la ligne principale Jetée Octroi était mise à double voie ce qui permettait d’augmenter les fréquences et la régularité.
Sur la ligne de Sainte Adresse, la voie restera unique avec évitements en raison de l’étroitesse des rues empruntées.
Ci dessous, la ligne 2 "Jetée - Graville" traversant la place Gambetta (rue de Paris). Au milieu de cette place, se dresse depuis 1924 le Monument aux Morts. En arrière plan, le bassin du Commerce.
Le matériel :
Trois types de voiture furent construites pour le réseau
Des courtes voitures sans impériale de5.90 m de longueur (deux petites plate formes ouvertes encadrant une caisse fermée. Ces voitures transportaient 16 voyageurs assis et 14 debout, pesait à vide 1,5 tonne et ne nécessitait pour leur traction qu’un seul cheval. Ces voitures étaient peintes en vert foncé.
Ci dessous, une remorque hippomobile classique, devant l'ancienne gare du Havre.
Des voitures à impériale : ces voitures étaient lourdes et nécessitaient deux chevaux. Leur instabilité sur les mauvaises voies entraînèrent leur retrait assez rapide du service. Elles pouvaient transporter 46 personnes dont 20 à l’étage.
Enfin des voitures d’été ouvertes d’un modèle inspiré des tramways de Marseille (qui appartenaient également à la CGFT).
Ci dessous, place de l'Hotel de Ville, à la hauteur de l'actuel magasin de chaussures BATA.
A l’ouverture du réseau, en 1874, 20 voitures étaient affectées à la ligne Jetée Octroi de Rouen et 5 à la navette Hotel de Ville Rond Point..
Les chevaux:
A son extension maximale, le réseau comptait environ 200 chevaux qui travaillaient 2h30 par jour en parcourant un vingtaine de kilomètres.
Les chevaux comme les voitures étant hébergés dans deux remises / écuries : la principale à Graville, une remise annexe destinée à la ligne de Sainte Adresse ayant été construite non loin de la Broche à Rôtir.
Ci dessus, le tramway à cheval de la ligne "Jetée Graville" (actuelle ligne 2 Bus Océane) est le centre d'interêt de cette photo. C'est le 1er Février 1874 que le premier tramway hippotracté circula au Havre. Vingt ans plus tard l'électrification commença précisement par cette ligne.
Cette vue a été prise devant la façade Sud de l'Hotel Frascati (emplacement actuel du Musée Malraux), vers 1885 (collection Lesauvage)